
Comparatif de résolution : capteurs numériques vs pellicule argentique
Résumé express : une diapositive 35 mm (Velvia/Provia) fournit en pratique ~12 à 22 MP de détail utile. Un plein format 24 MP la dépasse souvent ; un 45 MP (Z7 II/Z8/Z9) suréchantillonne surtout le grain et offre plus de latitude de traitement, sans révéler beaucoup plus d’information de sujet.
Vous numérisez vos archives et trouvez vos images « douces » à 100 % ? C’est normal : le capteur moderne voit au‑delà de ce que la pellicule 35 mm contient réellement. Ci‑dessous, je détaille les principes (MTF, lp/mm), mes tests terrain et une méthode de « dégrainage doux ». Pour un guide complet des méthodes de numérisation (scanner à plat, scanner diapo, boîtier + macro), voir mon article publié : Scanner ses photos argentiques : comparatif des méthodes.
Sommaire
- Comparatif des résolutions
- Un contexte personnel
- Matériel et équivalences
- Bases techniques : lp/mm & MTF
- Combien de MP utiles pour Velvia / Provia ?
- Capteurs Nikon Z : 24 MP vs 45 MP
- Pourquoi scanner en 45 MP ?
- Pourquoi les scans paraissent doux
- Dégrainage doux : méthode concrète
- Et le moyen format ?
- Récapitulatif comparatif
- Conseils pratiques
Comparatif des résolutions
Jusqu’où va le détail utile d’une diapositive 35 mm bien exposée et nette (Velvia/Provia) comparée aux capteurs plein format modernes ?
Un contexte personnel
En numérisant mes diapositives de Formule 1 (années 90), le rendu est révélateur : à 100 %, le grain est net mais l’image semble douce. Cela s’explique par plusieurs facteurs.
Il convient d’abord de distinguer deux méthodes de numérisation :
- Par scanner à plat : le rendu peut paraître « laiteux » ou moins contrasté. Le capteur CCD et l’éclairage diffus limitent le micro-contraste.
- Par reproduction avec un mirrorless : rendu plus pêchu, plus net et contrasté. Cela est dû :
- aux objectifs modernes très corrigés, au rendu clinique mais précis ;
- et à certains réglages du boîtier : désactivez toute accentuation automatique, désaturez le Picture Control, travaillez en RAW 14 bits, ISO bas (64/100) et lumière continue neutre (5000–5600K, CRI élevé).
Dans tous les cas, le capteur moderne peut dépasser la résolution exploitable de la pellicule : le détail sujet n’augmente plus ; seul le grain devient plus visible.
Matériel testé & périmètre (spécifique + équivalences)
Pourquoi détailler ? Pour ancrer l’expérience réelle et, en même temps, élargir la portée des conclusions.
- Boîtiers utilisés : Nikon Z8 (45 MP) et Z5 (24 MP).
- Numérisation : reproduction par appareil photo (copie de diapo) avec support JJC ; objectifs Nikkor Z 50 mm f/1.8 S et Nikkor MC 50 mm f/2.8.
- Films inversibles (E-6) : Fujifilm Velvia 50 (50 ISO) et Provia 100F (100 ISO) — applicables à d’autres films E-6 50/100 ISO (ex. Kodak Ektachrome E100).
Équivalences par résolution (résultats comparables) :
- ≈ 24–26 MP plein format : Nikon Z5/Z6, Canon R6/R8, Sony A7 III/A7c…
- ≈ 45–50 MP plein format : Nikon Z7 II/Z8/Z9, Canon R5, Sony A1… (tendance au suréchantillonnage du grain si la prise de vue/scanner “pousse” trop le micro-contraste).
Ces conclusions s’étendent à l’ensemble des boîtiers plein format (≈24, 36, 45 MP et au-delà), toutes marques confondues. En numérisation avec un reflex : MUP ou Live View/EFCS, retardateur 2–10 s ou déclencheur, trépied stable — pour supprimer les micro-vibrations.
La comparaison porte sur la résolution utile (lecture des fins détails/MTF) et non la seule définition en pixels. Pour la méthodologie de numérisation (scanner à plat, scanner diapo dédié, reproduction au boîtier), voir mon test détaillé : comparatif des méthodes de scan.
Les bases techniques : lp/mm & MTF expliqués simplement
Que veut dire « résolution utile » en photo ? Pour aller plus loin que les pixels, on utilise des notions comme le MTF, qui décrivent comment un système restitue les détails et le contraste.
lp/mm (paires de lignes par millimètre) mesure la finesse de détail qu’un support peut restituer : plus le nombre est élevé, plus on peut distinguer des alternances clair/foncé serrées.
MTF (Modulation Transfer Function) mesure la capacité d’un système (film + optique + numérisation ou capteur + optique) à transmettre le contraste de motifs de plus en plus fins. Plus la MTF est proche de 1, mieux le contraste est conservé ; plus elle se rapproche de 0, plus les détails “se noient”.
- MTF10 (≈ limite de résolution) : on distingue encore le motif, mais avec très peu de contraste.
- MTF50 (≈ netteté perçue) : fréquence où le contraste est divisé par deux ; c’est l’indicateur le plus corrélé au “piqué” que l’on ressent à l’œil.
En pratique : pour juger la netteté globale, compare surtout le MTF50 ; pour la finesse extrême (micro-détails), regarde le MTF10. C’est notamment pourquoi un capteur plein format de 45 MP peut paraître plus net qu’une diapo Velvia/Provia : sa MTF reste plus élevée aux hautes fréquences, alors que le film voit sa MTF chuter plus vite sous l’effet du grain et de la diffusion.
En clair : le film peut « résoudre » très fin mais avec un contraste faible à la limite ; le capteur, lui, a des pixels discrets mais conserve mieux le contraste au‑delà d’un certain seuil. C’est pour cela qu’un 24 MP peut paraître plus net qu’une diapo scannée « très haut ».
Combien de mégapixels utiles pour Velvia / Provia ?
Voici des conversions indicatives basées sur le format 24×36 mm :
- Résolution des Provia / Sensia 100 ISO : 60 lp/mm → 4320×2880 px ≈ 12,4 MP
- Résolution des Velvia 50 ISO : 80 lp/mm → 5760×3840 px ≈ 22 MP
En pratique, une diapositive 35 mm bien exposée, nette et numérisée proprement restitue 12 à 22 MP de détail utile, selon le film utilisé et les conditions de prise de vue.
Pour élargir la comparaison aux formats moyens :
- 6×4,5 moyen format : environ 30 à 40 MP utiles (Velvia en haut de la fourchette, Provia/Sensia plutôt en bas).
- 6×7 moyen format : environ 50 à 70 MP utiles, selon le film et la qualité de la numérisation.
Capteurs Nikon Z : 24 MP vs 45 MP
- Z5/Z6 (24 MP) : 6000×4000 px (~4230 dpi sur 36×24). Généralement au‑dessus d’une diapo 35 mm bien scannée.
- Z7 II/Z8/Z9 (45,7 MP) : 8256×5504 px (~5830 dpi). Suréchantillonne souvent la diapo : plus de latitude de retouche, pas forcément plus d’information de sujet.
Pourquoi scanner en 45 MP ?
Si une diapo ne délivre que 12–22 MP utiles, pourquoi la scanner avec un Z7 II, Z8 ou Z9 à 45 MP ?
- Pour la retouche locale fine : masques de gamme, correction d’éléments précis, etc.
- Pour l’archivage pérenne : on numérise une fois, on retravaille plusieurs fois.
- Pour l’impression grand format : même si le grain est suréchantillonné, un fichier plus riche permet une interpolation plus propre au tirage.
- Pour lisser le grain par downscale contrôlé : réduire ensuite à 24–30 MP donne un rendu très propre.
En bref : suréchantillonner permet une souplesse de flux et une latitude de traitement accrues.
Pourquoi les scans paraissent « doux »
- La pellicule ne contient pas davantage d’information : on amplifie le grain, pas le sujet.
- Les scanners à plat n’atteignent pas toujours leur résolution optique annoncée.
- L’affichage 100 % correspond à un tirage mural (120×180 cm et +), d’où cette douceur perçue.
Pour les méthodes de capture et d’éclairage (duplicateur JJC, boîtier + macro), voir le guide détaillé déjà publié : comparatif de numérisation.
Dégrainage doux : méthode concrète
Contexte : la numérisation au Nikon Z8 avec 50 mm f/1.8 S + bagues ou MC 50 mm f/2.8 dans un duplicateur JJC rend le grain très contrasté. Objectif : l’adoucir sans perdre le détail du sujet.
- À la prise de vue : ISO 64/100, RAW 14 bits, obturateur électronique, éclairage LED diffus (CRI ≥95) 5000–5600 K, parallélisme parfait. Éviter d’ajouter du contraste local (Clarity/Texture) à l’import.
- Dans Lightroom / ACR (piste de départ) :
- Accentuation (Sharpening) : Quantité 10–20, Rayon 0,8–1,0, Détail 0–10, Masquage 60–90 (appuyer Alt pour viser seulement les contours du sujet).
- Réduction du bruit : Luminance 5–15 (faible), Détail 30–50 ; Couleur 5–10.
- Optionnel : Texture −5 à −10 sur les aplats (masque de gamme Luminance pour épargner les contours).
- Dans Photoshop :
- Dupliquer le calque → Filtre > Bruit > Anti‑poussière, Rayon 2–3 px, Seuil 2–5 → Masque de fusion pour cibler ciels et aplats.
- Alternative micro‑lissage : calque en mode Luminosité + Flou gaussien 0,3–0,5 px → peindre au masque sur les zones granuleuses.
- Léger rééchantillonnage (downscale) vers 5000–6000 px de large pour une diapo : réduit la proéminence du grain sans sacrifier le sujet.
Important : la réduction de bruit IA de Lightroom traite le bruit numérique (gain ISO). Le grain argentique étant une texture « réelle », préférez un adoucissement contrôlé par zone.
Et le moyen format ?
Le passage au moyen format est souvent fantasmé comme un saut qualitatif décisif. Voici mon retour d’expérience :
- Un plein format 24 MP dépasse déjà une diapo 24×36 bien scannée.
- Un capteur 45 MP (Z7 II, Z8) est souvent supérieur à un 6×4,5 moyen format argentique en termes de finesse de détail utile.
- Le 6×7 argentique reste plus fin, avec un potentiel de 50 à 70 MP utiles. Mais attention : ce gain n’est pas automatique.
Pourquoi ? Parce que ce potentiel n’est atteint qu’avec des conditions optimales : optiques haut de gamme, stabilité parfaite, mise au point précise, développement rigoureux. Sinon, un 6×7 mal exploité peut sembler moins net qu’un bon 24×36 ou qu’un numérique plein format maîtrisé.
Si vous n’êtes pas professionnel de la publicité, de la beauté, de la nature morte ou d’un domaine nécessitant une résolution extrême, ne vous laissez pas influencer par les recommandations de certains youtubeurs.
À ce jour, un Nikon Z7 II ou un D850 d’occasion (≈1800 €) offre une finesse comparable au moyen format argentique et permet de produire des tirages fine art grand format dignes d’une galerie.
En clair : inutile d’investir dans un système moyen format numérique ou scanner moyen format si votre usage principal est artistique, documentaire ou patrimonial.
Récapitulatif comparatif
- Velvia / Provia (35 mm) : 12–22 MP utiles (selon qualité de prise de vue et de numérisation).
- Plein format 24 MP : généralement supérieur à une diapo 35 mm bien scannée.
- Plein format 45 MP : suréchantillonne souvent le film ; utile pour retouche fine et archivage.
- Moyen format : 6×4,5 ≈ 30–40 MP ; 6×7 ≈ 50–70 MP (toujours au‑dessus d’un 24×36 numérique 45 MP pour le détail sujet).
Recommandations pratiques
- Numérisation : boîtier plein format + macro, lumière homogène, planéité parfaite.
- Flux : travaillez par lots, conservez des RAW + XMP, et documentez vos réglages.
- Tirages : jusqu’à 40×60, un fichier propre de 24 MP suffit ; pour grands formats, visez un suréchantillonnage de qualité et un dégrainage doux.
À propos de l’auteur
Sebastien Desnoulez est photographe d’art, de voyage et d’architecture. Il explore la matière photographique avec une attention particulière à la lumière et à la composition. Passionné par l’héritage argentique, il partage ses recherches pour aider les photographes à mieux exploiter leurs archives.
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