Sous la pyramide du Louvre, photographie en noir et blanc de 1989
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Escalator du Louvre sous la pyramide, 1989 – Photo © Sebastien Desnoulez
Sous la pyramide du Louvre, 1989
À la fin des années 1980, le Musée du Louvre vient d’ouvrir sa nouvelle entrée sous la pyramide de verre. Nous sommes en 1989. Je remonte l’escalator parmi les visiteurs, un Nikon F sans prisme autour du cou. J’exerce une pression vers le bas sur le boîtier, sa courroie passée autour de mon cou est tendue et le stabilise. Avec mon Nikon 24 mm f/2.8 Ai-S, je choisis une vitesse lente autour de 1/15 s ou 1/8 s en acceptant que le flou fasse partie de l’image. Je vise, fais la mise au point et cadre directement sur le verre de visée du Nikon F dont j’ai retiré le prisme. Une photo isolée, un cadrage instinctif, qui deviendra pourtant l’une de mes images préférées dès le premier développement.
Composition : diagonales, netteté et flou
La mise au point est volontairement faite sur le dos et le bras de la personne qui me précède sur l’escalator. C’est elle qui devient le point d’ancrage de la photo, la seule présence vraiment nette dans un univers en mouvement. Autour, les silhouettes se mettent à glisser : les personnages sur l’escalator d’en face, les visiteurs dans le hall, l’architecture elle-même, légèrement adoucie par la pose lente.
Les lignes diagonales des mains courantes structurent l’image et guident le regard vers le haut du cadre, là où deux personnages flous semblent surgir de derrière le premier plan. On devine une conversation, un échange, un fragment d’histoire que la photographie ne montre pas mais suggère simplement. Le spectateur n’a pas toutes les réponses : il doit se projeter, imaginer sa propre narration.
En noir et blanc, la scène se simplifie. Les tonalités mettent en valeur le contraste entre la structure géométrique de la pyramide et la fluidité des silhouettes. Le grain argentique rappelle l’époque de la prise de vue et donne à l’image une texture particulière. Graphique, puissante, cette photographie résume bien ma manière de travailler : capter un instant, proposer une sorte de synthèse d’un lieu ou d’un moment, avec une forte dimension visuelle, sans forcément la rattacher à un reportage ou à une série plus vaste.
Du tirage papier à la numérisation
À l’époque, j’avais réalisé un tirage 18×24 cm sur papier Ilford Multigrade, avec marge blanche et bord du négatif en liseré noir. Ce tirage faisait déjà partie de mes favoris, accroché dans mon escalier, tandis que le négatif 24×36 restait rangé dans mes classeurs.
Je l’ai ressorti récemment dans le cadre d’un travail de redécouverte de mes archives argentiques. Pour en savoir plus sur ma méthode de numérisation des films 24×36, positifs et négatifs, vous pouvez lire les articles dédiés Comment scanner ses photos argentiques, scanner à plat, Nikon Coolscan ou appareil photo ? et Numériser ses négatifs noir et blanc avec un boîtier photo et les développer dans Lightroom.
Du film au numérique, une continuité
Revenir sur cette image du Louvre en 2025, la numériser puis la retravailler légèrement, c’est aussi une manière de mesurer le chemin parcouru depuis mes débuts en argentique. Je continue de cadrer et d’anticiper la scène avec les réflexes acquis à l’époque du film, où « faire vite et être parfait » était la devise du photographe de presse de sports automobile.
Les 36 vues par pellicule, l’attente du développement et la découverte des planches contact ont formé mon œil et influencent encore aujourd’hui mes images réalisées avec un Nikon Z8 ou d’autres boîtiers récents. Je raconte plus en détail cette évolution de ma pratique sur près de 40 ans dans l’article Évolution de la photographie, 40 ans entre film, numérique et mirrorless.
Pourquoi cette image compte pour moi
Parmi les photographies réalisées à cette période, cette scène d’escalator au Louvre occupe une place particulière. Dès le premier développement, elle s’est imposée comme l’une de mes images fétiches, sans être rattachée à un reportage ni à une série construite autour du musée.
Ce qui la rend importante pour moi, c’est sa capacité à condenser en un seul cadre la rencontre entre un lieu, un moment et quelques personnages anonymes. Une façon de faire le portrait d’un espace et de son atmosphère en une image unique, représentative de mon goût pour les compositions graphiques, qu’il s’agisse d’architecture, de paysage ou de scènes de rue.
En la numérisant aujourd’hui, je lui donne simplement une nouvelle vie, fidèle à son origine argentique.
À propos de l’auteur
Sebastien Desnoulez est photographe professionnel spécialisé en photographie d’architecture, de paysage et de voyage. Formé à la photographie au milieu des années 1980, il a couvert des compétitions de Formule 1 et réalisé des reportages à travers le monde, avant de se consacrer à une photographie d’art exigeante, mêlant composition, lumière et émotion. Il partage aussi son expérience technique à travers des articles pratiques destinés aux photographes passionnés, en s’appuyant sur une solide culture de l’image acquise en argentique comme en numérique.
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